Campagne RREX : mieux connaître la dynamique autour de la dorsale de Reykjanes pour mieux prévoir le climat

Le 6 juin à Brest, le navire océanographique Thalassa de l’Ifremer met le cap au sud de l’Islande pour la campagne RREX (Reykjanes Ridge Experiment) soutenue par l’Ifremer, le CNRS, Brest Métropole et le Conseil Général du Finistère. Jusqu’au 10 juillet, la vingtaine de scientifiques à son bord, dont des membres du LEGI, étudiera l’interaction entre les courants océaniques et la dorsale de Reykjanes, gigantesque chaîne de montagnes sous-marines située à l’extrémité nord de la dorsale médio-Atlantique.

Schéma de circulation des courants en Atlantique Nord.
© Ifremer, Pascale Lherminier

Virginie Thierry, chercheure au Laboratoire de physique des océans au Centre Ifremer Bretagne et chef de la mission RREX, explique : "La dorsale de Reykjanes est située dans une région clef de l’Océan Atlantique Nord, au point de rencontre entre les eaux chaudes et salées d’origine subtropicale et les eaux froides et peu salées d’origine subpolaire. Elle contraint très fortement la circulation océanique de l’Atlantique Nord. On soupçonne qu’elle a aussi une influence majeure sur les propriétés des masses d’eau issues du mélange entre les eaux subpolaires et subtropicales, et qu’elle joue un rôle fondamental dans la capacité de l’Océan Atlantique Nord à transporter et stocker de la chaleur et du sel, mais également de l’oxygène et du carbone anthropique. Pourtant, les mécanismes importants impliqués dans les interactions entre les courants et la dorsale sont encore mal compris, et donc probablement mal pris en compte dans les modèles de climat et de prévisions océaniques. Cela expliquerait leurs difficultés à représenter correctement certains courants de l’Océan Atlantique Nord et les propriétés des masses d’eau en aval de la dorsale de Reykjanes".

Une forte influence de la dorsale sur la circulation océanique…

Le sommet de la dorsale de Reykjanes culmine à 300 mètres de profondeur au voisinage de l’Islande et descend jusqu’à 3000 mètres à 1400 kilomètres au sud-ouest de l’Islande. Son influence sur la circulation océanique et les propriétés des masses d’eau a été mise en évidence lors des campagnes OVIDE, qui ont réalisé tous les deux ans, entre 2002 et 2010, des séries de mesures le long d’un parcours entre le Portugal et le Groenland. Elles ont permis de soulever de nombreuses interrogations concernant notamment :

  • les chemins privilégiés d’échanges entre l’est et l’ouest de la dorsale,
  • les mécanismes de transformation et de mélange des masses d’eau,
  • l’origine des dissymétries dans la structure des courants et des masses d’eau observées entre les flancs est et ouest de la dorsale.

… mais encore mal comprise

L’objectif de la campagne RREX est de mieux comprendre le rôle de la dorsale de Reykjanes sur la dynamique océanique et la transformation des masses d’eau. L’objectif in fine est d’identifier les mécanismes importants qui doivent être représentés correctement dans les modèles de prévision climatiques.
En effet, dans un contexte de changement climatique, ceux-ci doivent être en mesure de représenter au mieux la compétition entre les tendances opposées des deux masses d’eau qui se croisent au niveau de la dorsale de Reykjanes : un apport d’eau douce accru par les eaux d’origines subpolaires du fait de la fonte des glaces, et des eaux d’origine subtropicale qui deviendront encore plus chaudes et plus salées avec le changement climatique.

Un nouveau système de déploiement des flotteurs Argo testé

Durant la campagne, les paramètres tels que le courant, la température, la salinité, l’oxygène et les sels nutritifs seront mesurés grâce à une bathysonde déployée environ tous les dix à trente kilomètres. Un instrument de microstructure mesurant les zones de mélange intense via la détection des variations de ces paramètres à très petites échelles sera également mis en œuvre. Des mouillages courantométriques seront également déployés pour deux ans.
La campagne sera aussi l’occasion de tester un nouveau système innovant de largage, à des dates prédéterminées, de flotteurs Argo mesurant la température, la salinité et l’oxygène jusqu’à 2000 mètres de profondeur. Huit flotteurs répartis sur deux structures seront ainsi programmés pour être libérés à trois mois d’intervalle.

La campagne RREX est une contribution au projet RREX soutenu par l’Ifremer, le CNRS-INSU (LEFE), Brest Métropole et le Conseil Général du Finistère (CG29).
Elle est menée en coopération avec l’Institut de recherches marines de Vigo (IIM Vigo, Espagne). Le projet RREX est une coopération entre le Laboratoire de physique des océans (LPO/IUEM, Ifremer / CNRS / IRD / UBO), le Laboratoire d’océanographie et du climat : expérimentations et approches numériques (LOCEAN/Ecce Terra, CNRS / IRD / MNHN / UPMC), le Laboratoire des écoulements géophysiques et industriels (LEGI, CNRS / UJF / G-INP). La campagne RREX est une contribution au projet européen H2020 AtlantOS et la contribution française au projet international OSNAP (www.o-snap.org). Elle contribue au déploiement et à la valorisation scientifique des flotteurs profileurs du programme mondial Argo et de l’EQUIPEX NAOS.

Cette actualité est également relayée par :
 l’Institut National des Sciences de l’Univers du CNRS - INSU (source)

Mis à jour le 17 juillet 2018