Fin de la saison d’été austral 2013-2014 sur le continent antarctique pour les équipes du LGGE

Comme chaque année, la courte saison d’été austral a été l’occasion pour les équipes de recherche du LGGE de réaliser un certain nombre de programmes de recherche en Antarctique, tant en région côtière (Stations de Dumont d’Urville – Cap Prud’Homme) qu’en région centrale (Station de Concordia). Entre le 15 Novembre 2013 et le 20 février 2014, ce sont ainsi 17 techniciens, ingénieurs, chercheurs, enseignants-chercheurs et doctorants qui ont mis en œuvre les programmes scientifiques soutenus par de l’Institut Polaire – Paul Emile Victor (IPEV). En plus des programmes conduits sur les bases, cette saison 2013-2014 a également vu se dérouler une campagne de forage glaciologique dans le bassin Aurora, en collaboration avec l’Australian Antarctic Division ; des études scientifiques ont également été menées tout au long du convoi de tracteur ravitaillant le site de forage depuis Dumont d’Urville.

Programme CALVA :

Le programme CALVA (acquisition de données in-situ pour la CALibration et la VAlidation des modèles météorologiques et de climat) s’est également déroulé en Terre Adélie et au Dôme C. Six sites d’observation et près de 100 instruments de mesure météorologique sont visités, entretenus et/ou améliorés au cours de chaque campagne. Ces observations incluent le profilage météorologique et/ou de la neige soufflée sur des tours dont la hauteur s’échelonne de 7 à 70 m suivant les sites. Cette année, une campagne spéciale de mesure de la neige soufflée a été conduite avec des instruments permettant de caractériser l’évolution au cours du temps de la surface (rugosité) et de la turbulence permettant le soulèvement des particules de neige. Des déploiements spéciaux ont également été mis en œuvre pour une étude détaillée de la dynamique du vent catabatique, y compris le long des 1100 km de traverse motorisée de la côte jusqu’au Dôme C.

Programme NITEDC :

Dans le cadre d’une collaboration avec la National Science Fondation des États-Unis, nous avons mené durant une année complète l’étude chimique du manteau neigeux du Dôme C. Un dispositif de mesure des oxydes d’azote et de l’ozone avait été enfoui l’année précédente dans la neige et permettait la mesure des concentrations de ces espèces à différentes profondeurs de neige. Ce dispositif a fonctionné de manière automatique durant l’hiver car peu d’interventions sont possibles par les hivernants durant l’hiver glacial qui s’abat sur la station. Dès notre retour, pendant la saison estivale, le système d’acquisition a été modifié pour permettre l’étude de processus plus spécifiques. Des expériences de comparaison entre différents types de neige, en modifiant les conditions d’ensoleillement ou au moyen de chambres à flux ont été conduites. Les données acquises en grandes quantité sont en cours d’évaluation et d’interprétation. Un des résultats les plus marquants est la présence d’une production d’ozone dans le manteau neigeux l’hiver, résultat qu’à ce stade de l’étude on ne s’explique pas.

Photo : Mise en place des chambres à flux qui permettent de contrôler les conditions expérimentales d’exposition de la neige au rayonnement solaire ; en arrière-plan, le dispositif permettant d’isoler une surface de neige du rayonnement solaire. Le système de pompage d’air de la neige se trouve sous la bâche. Figure : Profil de concentration d’ozone dans et juste au-dessus du manteau neigeux (figure du haut, Janvier 2013, figure du bas, Décembre 2013).

Programme CESOA :

Le Service d’Observation CESOA vise à documenter sur le long terme les composés soufrés dans l’atmosphère des hautes latitudes Sud et leur lien avec le climat (Stations Dumont d’Urville et Concordia). Comme chaque été, la présence d’un chercheur du LGGE sur le terrain vise à garantir le bon déroulement des mesures sur le long terme (maintenance des équipements, remplacement de pièces, mesures d’intercalibration,…) mais aussi la formation sur le site du personnel hivernant à qui les prélèvements et analyses sont confiés pour l’hiver. Cette saison a également vu le déménagement des installations de collectes atmosphériques dans le nouveau bâtiment achevé en début de saison par les services techniques de l’IPEV.

Programme GMOstral :

Dans le cadre du programme européen GMOS, l’étude du mercure atmosphérique se poursuit à Dôme C, Dumont d’Urville et Ile Amsterdam. Plus de deux années de données continues ont été collectées sur les trois sites grâce au soutien technique des hivernants. Cela devrait permettre de mieux comprendre la dispersion dans l’hémisphère Sud de ce contaminant qui touche les chaînes alimentaires et les populations de l’ensemble de la planète.

Nouvelles installations de mesures de chimie atmosphérique à Dôme C (programmes CESOA, NITEDC, GMOSTRAL)

Programme DACOTA :

Le gros des activités dans le cadre du programme a consisté en la jouvence du réseau de déformation en surface sur le Glacier école de l’Astrolabe à l’aide de 9 stations GPS permanentes et autonomes. Il s’est agi de :

  • Réimplanter les structures suite à leur basculement d’ensemble en grande partie dû à la fonte estivale de la glace autour des structures porteuses
  • Repositionner certaines stations (les plus en aval) pour compenser le déplacement d’ensemble du glacier et ainsi maintenir le réseau en position fixe (de part et d’autre de la ligne d’échouage) d’une année sur l’autre
  • Récupérer les données acquises depuis la précédente saison estivale et remplacer les anciens récepteurs (GB-1000 de la marque TOPCON) par de nouveaux récepteurs plus performants et robustes (Net-R9 de la marque TRIMBLE)
Carte de vitesses sur la partie côtière du glacier de l’Astrolabe et emplacement des 9 stations du réseau GPS de déformation. En encart, un aperçu d’une station complète et notamment les éléments permettant l’autonomie énergétique (panneaux solaire, batteries...).

Programme GLACIOCLIM :

Depuis la campagne d’été 2003/04, 3 réseaux de balises sont suivis sur 156 km vers l’intérieur des terras afin d’évaluer le bilan de masse de surface en zone côtière de Terre Adélie. La mesure et l’entretien de ces réseaux ont été effectués comme chaque année, donnant accès à la plus longue série homogène et sur une telle étendue actuellement disponible en Antarctique.

Raid CHICTB et recherches à ABN :

Une expédition scientifique de grande ampleur, entre la base française Dumont d’Urville et le point GC40 du bassin Aurora en Antarctique, a été réalisée dans le cadre du projet Aurora Basin North (ABN). Elle a permis la mise en place d’une importante campagne de forage au point GC40 impliquant notamment le Centre de carottage et de forage national (C2FN) français. La visite de cette région inexplorée de l’Antarctique par moyens terrestres résulte d’une étroite collaboration entre l’IPEV, son homologue australien l’AAD et les scientifiques du Laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement (LGGE/OSUG, CNRS / UJF).

Ce raid a permis pour la première fois de visiter une zone inexplorée de l’Antarctique sur plus de 800 km et a fourni des informations originales dans un secteur non documenté, concernant la variabilité spatio-temporelle de l’accumulation neigeuse (qui conditionne en partie la taille de la calotte de glace antarctique et donc le niveau des mers) et certains traceurs géochimiques (projet IPEV CHICTABA). De nombreux carottages de 10 à 20 mètres de profondeur, des prélèvements de surface et plus en profondeur (puits de neige de 1 à 2 mètres) et un enregistrement radar de surface sur l’ensemble du chemin suivi ont ainsi été réalisés, offrant une information distribuée et continue de l’accumulation de neige et de sa variabilité. Sur le site d’ABN, trois carottiers ont été déployés, pilotés respectivement par les Australiens, les Danois et les Français (carottier réalisé par le C2FN du CNRS-INSU). Par ailleurs, un spectromètre laser de type SARA, construit par le LIPhy à Grenoble, a été utilisé avec succès pour mesurer sur le terrain en temps réel certains gaz traces contenus dans l’air prélevé le long du névé jusqu’à 105 mètres de profondeur. Les trois forages terminés le 12 janvier ont atteint entre 103 et 303 mètres de profondeur, ce qui donne accès à un enregistrement climatique très détaillé pouvant atteindre 2000 ans.

Ont participé à ces missions pour le compte du LGGE : O. Alemany, C. Amory, J. Chappellaz, A. Dufour, R. Duphil, F. Gillet-Chaulet, B. Jourdain, N. Jourdain, E. Lefebvre, E. Le Meur, O. Magand, L. Piard, G. Picard, P. Possenti, C. Ritz, M. Sacchetini, J. Savarino. Dans le cadre d’une année de volontariat scientifique gérée par l’IPEV, A. Thollot et S. Aguado à Dumont d’Urville, C. Lenormant à Concordia assurent les mesures routinières et la veille des équipements des différents programmes du LGGE au cours de l’hiver polaire.   Le LGGE remercie chaleureusement l’IPEV pour la mise à disposition des moyens logistiques permettant au LGGE de travailler dans ces environnements extrêmes.

Mis à jour le 16 avril 2014